Foire Saint Martin

LA PREMIÈRE FOIRE SAINT-MARTIN

Au XIIe siècle se tenaient à Angers, sur les Grands Ponts – emplacement du pont de Verdun – trois importantes foires : l’Angevine (8 septembre), la Saint-Nicolas (6 décembre) et le Lendit (10 février). La plus ancienne est l’Angevine, mentionnée dès 1060-1080. La construction des halles au XIIIe siècle motive leur déplacement sur la place des Halles (actuelle place Louis-Imbach) et aux environs. Les longues guerres du XVIe siècle en font perdre jusqu’au souvenir. Les foires ne sont rétablies que par les lettres patentes royales de décembre 1646, enregistrées par le Parlement de Paris en 1647. Elles ne sont plus qu’au nombre de deux et les dates sont modifiées : au lendemain de la Fête-Dieu et à la Saint-Martin d’hiver. C’est là l’origine de la célèbre foire Saint-Martin d’Angers.

Inauguration de la première foire

La première foire « nouvelle formule » est solennellement inaugurée le lendemain de la Fête-Dieu, le 21 juin 1647, par le maire et l’ensemble des échevins :

L’inauguration de la première foire de la Saint-Martin n’est pas relatée dans les registres du conseil municipal, mais deux délibérations l’organisent. Le 27 septembre 1647, la foire est annoncée et « publiée ». Les halles et la place environnante seront consacrées au commerce d’orfèvrerie, soierie, draperie, toile, droguerie, épicerie, mercerie, poêlerie, quincaillerie. Le marché aux bestiaux prendra place du faubourg Saint-Michel au faubourg Bressigny. Le 5 novembre, un règlement précis est édicté. La foire commencera le 12 novembre et durera huit jours. Les marchands angevins sont tenus d’exposer aux halles, sans quoi ils seront privés de leur étal. C’est que pour assurer le succès de la foire, la municipalité favorise la venue des marchands « forains » (étrangers à la ville).

Les foires comportaient deux grands secteurs : le commerce et le divertissement. D’un côté, la foire aux bestiaux, aux denrées alimentaires et aux produits de consommation ; de l’autre, les baraques des attractions foraines. Leur évolution dans le temps est inégale : la foire de la Fête-Dieu, dite du Sacre (Saint-Sacrement), a fini par être absorbée par la foire-exposition et les attractions foraines ont complètement disparu. En revanche, la foire Saint-Martin s’est maintenue dans sa partie « divertissement », abandonnant peu à peu le volet commercial au XXe siècle.

Le cirque Paul Bourgeois demande un emplacement pour la Saint-Martin, lettre du 16 septembre 1863. Archives municipales Angers, série I.

Affichette du cirque Bazola, années 1880. Il eut beaucoup de succès à Angers. Archives municipales Angers, série I.

Souvenirs de Victor Pavie

La période du début de l’hiver, l’éclat des lumières, marrons et vin chaud ont sans doute favorisé le développement des attractions foraines de la foire Saint-Martin. Tous les témoignages indiquent que ses « baraques » étaient très courues. L’écrivain Victor Pavie, dans ses Œuvres choisies parues en 1887 un an après son décès, se remémore avec émotion les foires de son enfance, autour de 1818. C’était « la joie, l’étrange, l’inconnu, l’inusité de toutes parts » :

Salle du Théâtre national ambulant : un exemple d’établissement que les Angevins pouvaient apprécier à la foire Saint-Martin. Archives municipales Angers, série I.

Apparition des manèges

Sous le Second Empire, les Angevins profitent du Théâtre historique, du célèbre prestidigitateur Conus, de multiples spectacles de plein air. En 1879, la grande attraction est la Troupe japonaise dont la belle tente domine tout le Champ de Mars (place du Général-Leclerc). La part est belle pour les cirques ! Ce ne sont qu’acrobates, ménageries, singes et chiens savants, géants, nains, femmes torpilles, hommes poissons… sans compter les tirs, jeux d’adresse, de hasard, loteries, chemins de fer circulaires et manèges de chevaux de bois, dont on commence à parler dans les années 1870. Gustave Bayol se fait le grand artisan de leur développement à partir de ses ateliers angevins, créés en 1887. En 1901, pas moins de cinq manèges s’installent à Angers pour la foire Saint-Martin, en plus du cirque Plège, d’une ménagerie, de théâtres…

Manège d’aéroplanes, vers 1910-1914, construit par les successeurs de Bayol. Coll. Jean-Pierre Baillergeau. [Archives municipales Angers, 15 Num 226]

Autodrome Eug. Denis, carte postale, vers 1912-1914. Archives municipales Angers, 4 Fi 2291. Le texte au verso forme légende : « Nous avons un temps épouvantable pour la foire Saint-Martin. […] Malgré cela, nous sommes sortis un peu hier soir et nous avons monté sur le beau manège que je t’envoie en carte. Je te promets que c’est chic. J’espère que nous pourrons y aller ensemble lorsque tu reviendras. »

Les foires à Angers au début du XXe siècle, d’après une lettre à en-tête du concessionnaire des marchés et foires d’Angers, J. Vernaison, 1er octobre 1901. Archives municipales Angers, série I.

Les foires suivent l’essor des nouvelles techniques : photographie, cinématographe. Elles deviennent si importantes que la question de leur emplacement au Champ de Mars se pose. Mais la foire Saint-Martin reste longtemps fidèle à son emplacement premier. C’est en 1964 seulement qu’elle est installée place La Rochefoucauld, où elle se trouve encore. La place du Général-Leclerc devenait décidément trop étroite et son occupation pendant près d’un mois constituait une entrave pour la circulation. Les forains apprennent cette décision avec une certaine amertume. « Le public se déplacera-t-il place La Rochefoucauld ? » Les premières années sont difficiles, la fréquentation est moindre. En 1965 même, les forains demandent à revenir place du Général-Leclerc, « la foire Saint-Martin ayant été un véritable désastre » (Le Courrier de l’Ouest, 27 décembre 1965). Mais, peu à peu, les habitudes se prennent, le public revient et le succès ne se dément plus. C’est aujourd’hui la deuxième plus grande foire foraine de l’Ouest.

Affiche de la foire Saint-Martin 1986. Archives municipales Angers, 6 Fi 2573.

Source : archives.angers.fr

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